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Le silence qui cause une très grande solitude,
Le silence qui fait mal,
Le silence qui tue.

J’ai appris à garder le silence quand j’étais toute petite.
Le silence sur le rejet d’une mère.
Le silence sur l’abus de mon père.
Le silence sur les chicanes violentes.

Le silence quand mon frère se promenait nu devant moi.
Le silence quand il a essayé de me noyer.
Le silence sur l’intimidation à l’école primaire.
Le silence sur les agressions au secondaire.
Le silence quand j’ai mangé un coup de hockey dans le vagin.

Le silence quand on m’a trainée dans le sable et qu’on m’en a fait manger.
Le silence quand le gars se masturbait dans son auto.
Le silence quand j’ai fait une fellation à un gars pour me faire aimer
et qu’il m’a urinée dans la bouche.

Le silence quand mon mari sortait dans les bars quatre ou cinq fois par semaine
et qu’il dépensait ses payes dans les machines.
Le silence de ne pas savoir comment j’allais nourrir les enfants
ou encore payer le loyer ou l’électricité.
Le silence pour ne pas causer des chicanes violentes parce qu’il était saoul et j’en passe…

Tout ça pour dire que le silence cause une très grande solitude.
Garder tous ces silences m’a détruite à l’intérieur.
Pourquoi garder le silence ?
Pour que les autres paraissent bien ?
Pour ne pas me faire juger ?
Est-ce pour me faire aimer ?
Était-ce parce qu’il n’y avait personne à qui parler ?
Était-ce pour acheter la paix ?

En tout cas, le silence est très lourd à porter.
C’est pour cela que j’écris ces quelques lignes parce que le silence me pèse beaucoup.
Il ne faut pas garder le silence.
J’ai retenu une pensée dans le journal du CALACS de l’an passé :
« Une joie partagée est une joie décuplée
et un chagrin partagé est un chagrin diminué de moitié. »

Merci de m’avoir donné l’opportunité de partager cela avec vous.

Anne-Marie, 44 ans (42 ans de silence)